Siglufjörður

Siglufjörður, une étape à ne pas manquer en parcourant les fjords du Nord de l'Islande.

Siglufjörður est une des bourgades islandaises qui nous a complètement séduits, tellement que nous y sommes retournés et que Renaud y emmènera Thomas. La première bonne raison tient peut-être au fait que le temps y a toujours joué en notre faveur. Au départ d'Akureyri, les routes offrent un itinéraire grandiose, d'abord par la no 1 qui franchit un col en traversant un paysage couvert à cette époque d'herbage et de fleurs des prés ou des marécages, puis la no 76 qui longe le fjord en prenant de la hauteur et en offrant de bons points de vue pour l'observation des phoques, des macareux et, au loin, des baleines. Avant d'y arriver, il vaut la peine de s'arrêter à la piscine d'Hofsós. Accrochée à la falaise, sa construction en béton armé nous permet de nous baigner et de sécher au soleil à l'abri du vent, avec une vue inouïe sur l'océan et l'île de Drangey.

Peu après avoir quitté Hofsós, la Skarðsvegur (793) rejoint Siglufjörður par un col passant devant le Torfnafjall. La piste est interdite à la circulation; mais elle est accessible avec un véhicule léger tout-terrain. Un affaissement et un éboulement empêche de passer avec un poids lourd. Cependant, en s'y aventurant, elle réserve d'excellents emplacements de bivouac. Le marche jusqu'au col nous emmène sur les hauteurs en traversant les pâturages de quelques moutons et de courlis cendrés qui n'apprécient guère notre visite.

Une fois passé un tunnel, nous découvrons sur la gauche un champ de ski. La Skarðsvegur conduit au départ de la remontée mécanique et nous comprenons pourquoi elle n'est pas ouverte à la circulation. Nous verrons d'autres pistes de ski durant le voyage. Elles ressemblent par leurs dimensions à celles de nos stations de moyenne montagne. Elles semblent bien équipées. Elles sont éclairées, on se rappelle que la nuit est longue en hiver sous cette latitude. Elles se situent la plupart entre 300 et 1'000 m. Quelques névés semblent en-haut ne pas fondre complètement en été. Espérons qu'elles jouissent d'un bon enneigement. L'Islande compte aussi sur le tourisme hivernal.

D'étonnantes murailles en courbes s'élèvent sur une dizaine de mètres en surplombant la ville. Des promenades ont été aménagées pour les longer sur leur crête. Elles offrent un point de vue fort apprécié des touristes sur la ville, son port et le fjord. Les passagers des paquebots qui relâchent à Siglufjörður, sur la route du Groenland ou du tour de l'Islande, se dégourdissent les jambes en s'y rendant. Un panneau indique qu'elles ont été érigées pour protéger la ville des avalanches et des éboulements. En élevant les yeux on aperçoit une multitude de barrières d'avalanche accrochées à la partie supérieure des sommets. En-dessous, les pentes sont couvertes d'hectares de lupins bleus. Nous apprenons qu'outre les qualités diététiques de ses graines, cette fleur est abondamment plantée pour lutter contre l'érosion. Ses fleurs abondantes cachent des racines solides et bien ancrées qui contribuent à stabiliser efficacement le sol. Et la plante résiste admirablement à la rudesse du climat.

Le centre de la bourgade est composé du port, du camping, d'un hôtel, de deux restaurants et de deux ou trois boutiques construits sur les anciens quais tombés en désuétude suite à l'effondrement de l'industrie du hareng, dans les années soixante. C'est petit, c'est pimpant, c'est convivial. On sent une ville autrefois importante - la démographie a perdu 90% de sa population avec la crise du hareng - qui oeuvre à sa conversion au tourisme depuis plusieurs années, avec une très heureuse inspiration. Et comme d'autres régions sinistrées suite à de grosses crises industrielles, Siglufjörður a transformé la friche laissée par son industrie du hareng en un musée très réussi sur l'épopée qu'a connu la pêche et l'exploitation de ce poisson. Le Musée de l'Ere du Hareng (Síldarminjasafnið) de Siglufjörður est un incontournable. Il rend admirablement compte de la pêche et de la valorisation de son produit ainsi que des conditions d'existence des personnes employées aux différents métiers y touchant. Les ateliers fournissants les services accessoires comme la chaleur, l'électricité, la mécanique ou la charpenterie complètent opportunément les secteurs consacrés à la pêche et à sa valorisation. La présentation des logements des ouvriers et des habits et autres objets de leur vie quotidienne est aussi très réussie.

Fort heureusement la pêche n'a pas disparu. Un excellent poissonnier vend sur la place des produits fraîchement arrivés ou conditionnés pour une longue conservation. Ils sont savoureux. D'autres pêcheurs emmènent les intéressés admirer de près les baleines et les phoques. C'est toujours très impressionnant d'être assis dans une frêle embarcation alors qu'une immense baleine se glisse par dessous ou se projète en l'air à quelques mètres. Nous sommes rassurés de savoir que la baleine est en Islande protégée par une régulation très stricte de sa pêche et que le requin avec lequel est confectionné le hákarl n'est plus menacé de disparition. Et un peu plus loin, il convient de ne pas omettre de mentionner le très réussi Centre de la Musique traditionnelle islandaise. On y est reçu par une démonstration de fidla, ancêtre des instruments à cordes, en particulier du violon, jouée par le gérant. Le centre propose un bain dans le chant et la musique traditionnels islandais au moyen d'une multitude d'enregistrement et de films très émouvants. Je l'ai écrit dans ma chronique précédente, le chant et la musique traditionnels islandais ont commencé à nous séduire définitivement en entrant dans cet endroit.

Siglufjörður est donc une halte qui s'impose autant pour ses réponses à nos besoins logistiques de voyageur que pour son offre touristique et pour le séjour pittoresque mais confortable à son camping en plein centre, à côté du port.


Siglufjörður, le 12 juillet 2017 / Renaud Tripet


Sólsetursljóð