Nos chroniques
Nos chroniques
Cable Cars
Les tramways câblés de San Francisco sont à la fois paradoxaux, précurseurs et promoteurs. Dans un pays obnubilé par la sécurité des personnes ils en sont la négation, ils ont notamment été construits pour leur efficience énergétique et ils donnent un image de San Francisco des plus sympathiques.
Les tramways câblés de San Francisco appartiennent aux remontées mécaniques, celles-ci étant caractérisées par une attache débrayable. Le gripman, autrement dit le conducteur, actionne un levier permettant de serrer le câble ou de s'en désolidariser. Il dispose aussi d'un frein à main. C'est en jouant de ces deux manettes qu'il assure la traction de la voiture dans les réputées côtes raides de San Francisco, qu'il laisse obligatoirement aller dans les courbes et les croisements - il doit compter sur son élan, pas de câble aux aiguillages et en courbes - et qu'il stoppe son engin aux arrêts. En plus, il joue de la clochette suspendue au-dessus de sa tête pour aviser les automobilistes qui oublieraient que le tramway câblé et ses passagers jouissent d'une priorité en toutes circonstances.
C'est ce que j'appelle le paradoxe du tramway câblé de San Francisco. Les passagers montent et descendent au milieu des carrefours, ils s'asseyent sur des bancs tournés vers l'extérieur ou ils restent debout sur les marchepieds, une jambe et un bras dépassant allègrement du gabarit du tram. Dans un pays obnubilé par la sécurité des personnes et par la responsabilité civile, c'est paradoxal. Je croyais à tort que des passagers aussi mal installés ne se voyaient que sur les toits des trains africains ou indiens.
Bref, le gripman et son accompagnateur contrôleur forment un couple qui, outre le fonctionnement de l'engin et l'encaissement des courses, assurent l'ambiance à bord ou au terminus, au moment de faire pivoter d'un demi-tour la voiture de sept tonnes sur sa plateforme à la seule force de leurs muscles. D'aucuns sont d'ailleurs des personnalités bien connues de la ville.
Les tramways de San Francisco sont aussi précurseurs de l'économie énergétique. Ils s'imposèrent à la fin du 19ème siècle comme la solution la plus rentable en terme d'énergie. Cinquante ans plus tard, il furent menacés de disparition, pour être remplacés par les tramways non câblés et les trolleybus dont l'exploitation était plus économique. Mais ces nouveaux modes de transports publics, qui circulent encore aujourd'hui, n'ont jamais atteint le fréquence d'une voiture toutes les quinze secondes, comme ce fut le cas des tramways câblés au plus fort de leur utilisation. C'est à un mouvement citoyen emmené juste après la guerre de 39 par vingt-sept femmes sous la houlette de Friedel Klussmann que nous devons de pouvoir encore aujourd'hui sauter sur les marches des tramways câblés de San Francisco.
Les Cable Cars constituent aujourd'hui, avec le Golden Gate Bridge, les meilleures images publicitaires et les principale attractions touristiques de la ville. Il n'est plus question de s'en défaire, San Francisco a su les inscrire judicieusement à son patrimoine indestructible, même quand les tremblements de terre ébranlent leurs fondations.
RT, à suivre...
29.04.15
Entre deux Gares