Nos chroniques
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Les couloirs du temple de Chavin de Huántar
Un des points forts de nos quelques jours dans la Cordillère Blanche n'aura pas été ses sommets enneigés, mais les couloirs profondément enfouis du temple de Chavin de Huántar. Outre la manière de les construire, ce qui rend les pyramides d'Egypte mystérieuses, ce sont bien les couloirs secrets conduisant à la chambre mortuaire du pharaon. Dito du temple de Chavin de Huántar, construit par la civilisation Chavin entre 1200 et 800 av. JC.
On ne résiste pas à s'y engouffrer. Il fait moins chaud, mais en s'enfonçant dans le labyrinthe qu'ils constituent, en se laissant surprendre par l'étonnant totem juché dans une pièce seulement visible par une petite ouverture, en baissant la tête pour éviter de se cogner aux blocs de la construction dont certains ont été fendus par l'activité sismique permanente, on sue quand même et on est bien content d'en ressortir...
Le sommet culminant de la Cordillère Blanche est le Nevado Huscarán et ses 6768 m. Il y a aussi les 5947 m du Nevado Alpamayo, désigné par le Club Alpin Allemand la plus belle montagne du Monde. On tourne autour de ces montagnes en parcourant des routes ou des pistes dont certaines traversent la chaîne en franchissant des cols impressionnants et en traversant des vallées cultivées à la force humaine ou animale jusqu'à 4000 m. Les multiples installations d'irrigation rappellent singulièrement les bisses alpins. L'eau n'arrive pas dans les maisons et on voit les familles s'installer le long des canaux pour la toilette ou la lessive. Des sentiers muletiers permettent d'accéder aux champs ou aux sources; mais c'est le plus souvent à dos de femmes ou d'hommes que le produit des cultures ou le bois est acheminé au village. Sans les pickups surchargés, les quelques microbus et les rares voyageurs en camping-car, on se croirait retourné cent ans plus tôt dans nos montagnes. C'est assez émouvant de penser que nos ancêtres ont connu une vie aussi dure que celle des nombreuses populations montagnardes vivant encore aujourd'hui dans les Andes. Celles-ci et nos ancêtres montagnards nous inspirent un immense respect.
Nous avons quitté cette sublime cordillère en empruntant au Nord la route du Canyon du Canard (Cañon del Pato). En matière de sensations fortes, c'est probablement une des meilleures. Il suffit d'imaginer une piste accrochée à un des flancs du canyon, plusieurs centaines de mètres au-dessus de la rivière, dans une montagne friable qui n'arrête pas de glisser ou de s'écrouler. Il n'y a la plupart du temps pas de bordure, si bien qu'on se demande comment résiste le côté aval des quelques endroits plus larges pour croiser. Est-ce utile de préciser que nous roulions du côté aval.
Pour éviter les accidents à répétition, une trentaines de tunnels ont été creusés, mais à une voie et pas toujours rectilignes. Et la circulation est ouverte dans les deux sens, y compris aux camions. Effectivement, de nombreuses mines, généralement petites, notamment de charbons, sont exploitées et le minerai est acheminé par camion. Alors nous avons pu tester nos capacités à reculer aux rétroviseurs sur de longues distances pour laisser passer des camions, nous avons appris à considérer le bord de la piste solide sans trop analyser, même si cent mètres plus loin il venait de glisser dans la rivière, et nous avons constaté que notre résistance au stress pouvait atteindre un niveau insoupçonné. Ce jour-là nous avons bivouaqué 3390 m plus bas que la veille, au bord de l'océan, tout contents d'y être arrivés sans encombre.
A suivre...
01.09.14
So What