Nos Chroniques
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Terre de Feu mais plus d'Indiens
Magellan et son corps expéditionnaire autour du Monde furent en 1520 les premiers européens que rencontrèrent les indiens de Terre de Feu. Ceux-ci se répartissaient en quatre peuples cousins: les onas ou shelk'nams au centre et au nord de l'île, les yamanas le long des cours d'eau et des îles du sud et du sud-ouest, les alacalufs à l'ouest et les hauschs au sud-est. Ils sont probablement les seuls peuples à avoir complètement disparu suite au contact des européens.
Il ne reste que peu d'informations sur les alacalufs et les hauschs. Les onas et les yamanas se nourrissaient de chasse et de cueillette. Les hommes chassaient à l'arc, avec l'aide de chiens domestiqués. Le guanaco constituait le gibier principal. Il procurait la viande et la peau. Ses os et ses tendons étaient utilisés pour confectionner des ustensiles. Les femmes et les enfants s'adonnaient à la cueillette de baies, de champignons, de fruits et de racines. Les yamanas peuple de marins, utilisaient en plus de grands canoës fabriqués par les hommes. Ces-derniers chassaient des phoques ou pêchaient au harpon alors que les femmes manoeuvraient l'embarcation.
L'organisation sociale des onas et des yamanas était égalitaire. Ils n'avaient pas de chef, sauf en cas de guerre. D'aucuns, femmes ou hommes, étaient reconnus pour leurs dons en matière de prévision du temps, de médecine ou de prophétie. La beauté des femmes et des hommes était valorisée; alors qu'ils n'attachaient pas d'importance à l'accumulation de biens. Ceux-ci faisaient l'objet de dons, pour le plaisir. Le respect de chaque être vivant et de chaque élément de la nature était à la base de leur culture, fondée sur l'unité entre l'être humain et la nature.
Les rites d'initiation et de passage à l'âge adulte, appelés hain ou kleketen chaz les onas et chiejaus chez les yamanas, pouvaient durer plusieurs mois. Les garçons étaient encouragés à trouver une fille d'un groupe éloigné pour éviter la consanguinité. Des "rapts" de filles avaient lieu; mais les relations entre époux étaient égalitaires, même si elles étaient fondées sur une nette répartition des tâches. Les divorces pouvaient être à l'initiative des femmes ou des hommes. Les hommes prenaient la plupart du temps une seconde épouse, généralement choisie parmi les soeurs de la première ou parce-qu'elle était la veuve d'un parent.
Les chants, les danses et les jeux constituaient les distractions des onas et des yamanas. Le lutte était un sport fréquent entre hommes. Les femmes et les hommes s'adonnaient tous deux aux jeux de balle.
La mort était considérée comme un événement naturel. Il n'existait pas de vie au-delà ni pour les onas, ni pour les yamanas.
Les jugements du jeune Darwin, accompagnant le capitaine Fitz Roy en Terre de Feu sur son bateau, étaient imprégnés du racisme qui pénétrait l'élite européenne de l'époque. Il désignait les indiens de Terre de Feu d'êtres inférieurs qui vivaient constamment sur leurs canoës. Il ne démentit jamais l'anthropophagisme dont il les accusa à tort. S'agissant de leur prétendue vie à bord de leurs canoës, Charles Darwin étant toujours resté à bord de son bateau, il ne vit donc que des indiens qui lui rendaient visite en canoës. Les indiens n'ont, quant à eux, pas déduit que les européens ne vivaient que sur des grands voiliers. Si Darwin avaient procédé à quelques vérifications sur l'anthropophagisme dont il accusa les indiens de Terre de Feu, en se basant sur une mauvaise interprétation des dires d'un indien emmené en Europe et ramené en Terre de Feu par Fitz Roy, il aurait au contraire constaté que les onas et les yamanas faisaient état d'une aversion absolue de tout homme ou animal mangeant de la chair humaine.
Aux jugements discutables de Darwin suivirent les arrivées massives d'européens intéressés par les ressources de la Terre de Feu: bois, chasse de la baleine et du phoque, terres d'élevage pour la laine, or, phospate pour les engrais et les explosifs. Les intérêts économiques et stratégiques ont réduit à néant les espaces vitaux des indiens de Terre de Feu. Ils les ont réduit à néant et ce génocide est encore aujourd'hui occulté. Il convient certes de tourner les pages de l'histoire, même les plus horribles, mais pas sans procéder aux analyses psychologiques et sociologiques à la base du progrès des comportements et de la pensée humaines. Alors, nous ne citerons pas les noms, pour la plupart connus, des responsables de l'extermination des indiens de Terre de Feu, nous nous limiterons à rappeler le tragique banquet de la réconciliation de Rio Grande, auquel furent invités vers 1900 tous les onas de la région, femmes et hommes, jeunes et vieux, et, qui furent tous assassinés impunément par balle à la fin du repas. D'autres faits analogues ont eu lieu.
Il ne reste plus que la terre des indiens de Terre de Feu, aidons les argentins et les chiliens à la préserver le plus longtemps possible en respectant les consignes écologiques adressées aux touristes.
A suivre...
Sources: Les peuples indiens de Terre de Feu, Geneviève Fremaux, Editorial Utopias, 2009 et Musée Yamana, Ushuaia, 2013.
24.11.13
Camino del Indio